1. Qui (montre qu'on) éprouve un sentiment pénible, une gêne à l'idée d'enfreindre certaines convenances sociales, culturelles, morales, ou en prenant conscience de son infériorité, de son imperfection vis-à-vis de quelqu'un/quelque chose. Synon. confus, gêné; anton. effronté, éhonté.Se sentir honteux; geste, sourire, visage honteux; face, grimace honteuse. Vous l'avez rendu honteux par les reproches que vous lui avez faits (Ac.). Son attention fut détournée par trois ouvriers qui passaient, levaient la tête de son côté, avec un rire gouailleur (...). Humilié d'être là, d'y être vu, il se retira d'un haut-le-corps honteux (Vogüé, Morts,1899, p. 301).Deux yeux verts (...) qui exprimèrent (...) une gaieté où je crus discerner un peu de timidité, d'une timidité honteuse et fanfaronne (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 792) :1. Albert s'approcha de Berthe, qui détourna la tête pour essuyer sa plume, l'air absorbé, fuyant et comme honteux. − Elle a besoin de me parler pour son divorce. C'est tout naturel.
Chardonne, Épithal.,1921, p. 273.
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[Avec un compl. introd. par de indiquant la raison pour laquelle on est honteux] ♦
Honteux de + subst.Je suis honteux de ce que j'ai à dire, madame, reprit Leuwen, mais enfin mon devoir d'homme d'honneur veut que je parle (Stendhal, L. Leuwen, t. 2, 1835, p. 69) :2. − Valdemar, fis-je d'une voix qui devait être pathétique et dont je le vis ému, crois-tu, toi, comme tant de gens, que la science... Je m'arrêtai, honteux de ma question, honteux de moi-même.
Duhamel, Jard. bêtes sauv.,1934, p. 204.
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Honteux de + inf.N'êtes-vous pas honteux de vous être emporté de la sorte? Il devrait être honteux d'avoir manqué de parole (Ac.). Excusez-moi, madame, je suis honteuse de pleurer comme ça devant vous, mais je ne peux pas retenir mes larmes (Becque, Corbeaux,1882, II, 1, p. 101) :3. « Salaud! Si j'ai eu la panne, c'est ta faute, avec ta rage de voler à deux mille, en plein dans les courants contraires! Si tu m'avais suivi plus bas, nous serions déjà à Port-Étienne! » Et l'autre qui offrait sa vie se découvrait honteux d'être un salaud.
Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 251.
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Emploi subst. Personne qui éprouve de la honte (cf. ce mot B) ou une grande réserve. Les maîtresses d'officiers français, les honteuses et les affichées, les enceintes et les sveltes, couraient après leurs amants à cheval (Morand, Flagell. Séville,1951, p. 346).♦ Proverbe. Il n'y a que les honteux qui perdent. Par manque d'audace on rate les bonnes occasions. J'ai fait ce que j'ai dû faire, et ce serait à refaire que je le referais... Dans la vie, il n'y a que les plus honteux qui perdent (Zola, Pot-Bouille,1882, p. 35).
2. a) Vieilli. Qui est d'une timidité telle qu'il éprouve habituellement de la honte (cf. ce mot B). Synon. timide; anton. déluré, hardi.La plupart des enfants sont honteux devant les personnes qu'ils ne connaissent pas (Ac.1835-1935).Mais Madeleine, qui s'était imaginé pouvoir questionner tout tranquillement le champi, se trouva du coup interdite et honteuse comme une fille de quinze ans (Sand, F. le Champi,1848, p. 190).De l'adolescent hérissé, honteux, qu'il était encore, elle avait fait un homme nouveau qu'il devait être à tout jamais (Mauriac, Désert am.,1925, p. 12).
b) Subst. exprimant un état + honteux.Qui a honte ou qui se cache d'être tel qu'il est. Inverti honteux. Vêtus comme des pauvres honteux qui conservent un extérieur décent et qui hésitent à demander l'aumône (Balzac, Rech. absolu,1834, p. 324).Nietzsche est un athée qui tire durement et logiquement toutes les conséquences de son athéisme. Mais M. Bataille, lui, est un chrétien honteux (Sartre, Sit. I,1947, p. 178).