1. Au sens phys. Anton. se redresser, se relever :11. Depuis son retour à Chantilly, Maurice est enfoncé dans un coin sombre de son cabinet, fuyant le jour, le bruit, se fuyant lui-même; il étend ses doigts crispés sur son front en sueur; il écoute; il parle vite, seul, tout bas; il va à la porte, à son secrétaire, à la croisée; il court ensuite se blottir, s'affaisser, se faire petit dans son coin, les cheveux hérissés, le front jaune, l'œil ouvert.
L. Gozlan, Le Notaire de Chantilly,1836, p. 248.
12. Une balle pourtant, mieux ajustée ou plus traître que les autres, finit par atteindre l'enfant feu follet. On vit Gavroche-chanceler, puis il s'affaissa. Toute la barricade poussa un cri; mais il y avait de l'Antée dans ce pygmée; pour le gamin toucher le pavé, c'est comme pour le géant toucher la terre; Gavroche n'était tombé que pour se redresser; ...
V. Hugo, Les Misérables,t. 2, 1862, p. 461.
13. On la saisit, on la jeta contre les murs encore chauds de son logis. Puis douze hommes se rangèrent vivement en face d'elle, à vingt mètres. Elle ne bougea point. Elle avait compris; elle attendait. Un ordre retentit, qu'une longue détonation suivit aussitôt. Un coup attardé partit tout seul, après les autres. La vieille ne tomba point. Elle s'affaissa comme si on lui eût fauché les jambes.
G. de Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, La Mère sauvage, 1884, p. 239.
Rem. 1. Syntagmes fréq. : s'affaisser sur soi-même, s'affaisser dans un fauteuil, sur une chaise, - sur les genoux. 2. Tantôt s'affaisser signifie plutôt le déroulement de l'action perfective, et l'aboutissement est alors exprimé par des verbes comme tomber (ex. 13); tantôt il signifie lui-même l'aboutissement, et le déroulement du procès est alors exprimé par des verbes comme chanceler (ex. 12). À noter, pour le 1ercas, la possibilité d'employer les adv. doucement et lentement. 3. Dans l'ex. 11, l'expr. se faire petit, synon. de s'affaisser, suggère une nuance de sens comparable à celle qui est indiquée sous A (baisser de niveau). 4. Noter les expr. s'affaisser de fatigue, de vieillesse (cf. infra ex. 14).
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P. anal. [Le suj. est un animal, une plante, une construction, etc.] :
14. Voici une maison qui sert aujourd'hui de magasin de modes et qui est un curieux spécimen de la Renaissance. Elle porte sa date, 1571; mais, malgré les soins extérieurs de propreté qui la font reluire à l'œil comme une construction récente, on voit que l'âge l'accable, car elle penche et semble s'affaisser de vieillesse.
M. Du Camp, En Hollande,1859, p. 212.
2. Au sens moral. Perdre sa vitalité : 15. Sûrement, j'étais ivre, pensait-il; cette femme m'avait soûlé de caresses. Bon Dieu! ai-je été bête et fou! je risquais la guillotine, avec une pareille histoire... Enfin, tout s'est bien passé. Si c'était à refaire je ne recommencerais pas. Laurent s'affaissa, devint mou, plus lâche et plus prudent que jamais. Il engraissa et s'avachit. Quelqu'un qui aurait étudié ce grand corps, tassé sur lui-même, et qui ne paraissait avoir ni os ni nerfs, n'aurait jamais songé à l'accuser de violence et de cruauté.
É. Zola, Thérèse Raquin,1867, p. 99.
16. ... père, quand je suis avec toi et que j'entends ta parole, où je sens qu'est la vie, quoique je ne la comprenne pas toujours, je suis prête à tous les sacrifices et j'accepte ma destinée, bien que dure. Au contraire, quand je ne suis pas soutenue par tes regards, je m'affaisse.
E. Renan, Drames philosophiques,Le Prêtre de Némi, 1885, II, 7, p. 563.
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P. ext. [Le suj. désigne une fonction, une composante morale ou spirituelle de la pers. : intelligence, raison, âme, esprit] :
17. ... la léthargie d'une nation où il n'y a pas d'opinion publique se communique à son gouvernement, quoi qu'il fasse. N'ayant pu la tenir éveillée, il finit par s'endormir avec elle. Ainsi donc tout se tait, tout s'affaisse, tout dégénère, tout se dégrade chez une nation dont la pensée est esclave; ...
B. Constant, De l'Esprit de conquête et de l'usurpation,1813, p. 232.
18. ... Il passait, le front baissé, les yeux pleins de larmes. Son esprit, qui, sous le double fardeau du chagrin et de l'âge, avait déjà beaucoup baissé, acheva de s'affaisser sous le sentiment du mépris public; ...
J. Sandeau, Mademoiselle de la Seiglière,1848, p. 23.
Rem. S'affaisser est fréquemment suivi d'un compl. introd. par la prép. sous (ou de) : sous le poids, sous l'influence de qqc., sous l'effort.