1. Vx. Dérèglement passager du comportement, pouvant caractériser certaines folies, et se manifestant par des actes d'extrême violence. Folie furieuse. Selon lui [Arétée], les premiers [délires] sont caractérisés par la mélancolie ou par la fureur; les seconds, par le désordre des sensations et de toutes les opérations mentales (Cabanis, Rapp. phys. et mor.,t. 2, 1808, p. 368).Je finirais par tomber dans un état d'idiotisme ou de fureur (Flaub., Corresp.,1842, p. 123).Cf. conscient ex. 2 :
1. Le médecin me dit : « Il a de terribles accès de fureur, c'est un des déments les plus singuliers que j'aie vus. Il est atteint de folie érotique et macabre. »
Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Chevel., 1884, p. 935.
− P. méton., au plur. Ces actes eux-mêmes. Toutes les nuits, deux hommes veillaient ainsi près de moi pour me tenir de force lorsque j'étais en proie aux fureurs du délire (Sand, Mauprat,1837, p. 168).
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En partic., littér. Délire inspiré du poète, du prophète. Fureur lyrique, poétique. Synon. enthousiasme, inspiration.Virgile décrit la fureur de la Sibylle (Barrès, Cahiers,t. 12, 1919-20, p. 313).Ce prophète aux yeux durs qui nuit et jour couvait une fureur sacrée (Saint-Exup., Citad.,1944, p. 804):2. La fureur sacrée des Sibylles est plus près de nos passions que nous ne voulons le croire. Ces convulsions exprimaient une pensée totale, et assurément vraie; car le monde entier et l'avenir prochain, chacun de nous le porte...
Alain, Propos,1922, p. 409.
2. Colère intense, aux effets souvent démesurés. Fureur populaire, sauvage, aveugle; grande, violente fureur; fureur et désespoir; cris, larmes, mouvements de fureur; entrer, mettre en fureur. Et qui vous dit que j'en suis offensé? s'écria-t-il avec fureur en se redressant violemment sur la chaise longue (...) cependant que, tandis que se crispaient les blêmes serpents écumeux de sa face, sa voix devenait tour à tour aiguë et grave comme une tempête assourdissante et déchaînée (Proust, Guermantes 2,1921, p. 558).Cf. abomination ex 4 :
3. ... le duc dans l'un des salons, s'abandonnait à sa frénésie. La fureur l'étouffait, lui étranglait la voix. (...) et, presque en écumant de rage, il éclatait contre son frère, ce perfide, ce lâche, ce fourbe et autres noms à faire baisser les yeux; puis des jurons, des invectives, des clameurs et des coups de talon.
Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 21.
a) P. méton., au plur. Accès de violente colère. Les fureurs de la populace. Il faut être à jeun pour chanter la bouteille, et nullement en colère pour peindre les fureurs d'Ajax (Flaub., 1reÉduc. sent.,1845, p. 244).[Nana] tragique dans ses fureurs de femme trompée (Zola, Nana,1880, p. 1361).
b) En partic. − Colère divine. Seigneur, ne me reprenez pas dans votre fureur (Ac.).Synon. littér. courroux.Les oraisons liturgiques protestantes qui venaient d'être récitées avaient offert la mort sous un aspect épouvantable. La face de fureur de Dieu. La vengeance éternelle. La colère divine qui est dans la mort, etc. (Hugo, Corresp.,1865, p. 485).
− Rage meurtrière, frénésie sanguinaire accompagnant un engagement armé, une lutte, etc. Le fanatisme dans tous les genres est une fureur meurtrière, et l'homme est si dépravé, que la férocité même finit par lui offrir des jouissances auxquelles il se livre avec transport (Baudry des Loz., Voy. Louisiane,1802, p. 199).Dans la guerre, c'est le désir de nuire, la cruauté de la vengeance, une âme inapaisée et implacable, la fureur des représailles, la passion de la domination (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 75).
c) P. anal. − Impétuosité d'un animal irrité. Un lion en fureur. La fureur d'un taureau. Mettre un taureau en fureur (Ac.). [Véronique] bondissant comme un tigre en fureur (Gautier, Albertus,1833, p. 171).
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Caractère violent, déchaînement d'un phénomène naturel. Fureur des flots, des vents. Ils tirèrent le canot sur la grève pour le mettre à l'abri de la fureur de la mer (Voy. La Pérouse,1797, p. 26).Sous leurs murailles massives [des métairies], on s'abrite tant bien que mal de la fureur des saisons (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 7):4. L'eau brisée retombait des maçonneries en nappes calmes pour rejoindre la fureur de la Manche et mettait sur la vague hurlante le contraste des sources plaintives. De sa bave salée, le flot insultait la forêt de poutres qui posait devant sa violence la tranquillité des vieux arbres.
Hamp.Marée,1908, p. 34.
♦ P. méton., au plur. Manifestations violentes, excessives d'un phénomène naturel. Malgré les fureurs de l'ouragan, le fracas de la tempête, le tonnerre de la tourmente, Harbert dormait profondément (Verne, Île myst.,1874, p. 55).Il [Robinson] évoquait en larges gestes la majesté des forêts inconquises et les fureurs de la tornade équatoriale (Céline, Voyage,1932, p. 497).