A. − Mi- + adj. ou part. passé adj.[Les mots constr. sont des adj.; ils définissent un état intermédiaire entre deux réalités dont l'une est implicite. Mi- y a la même valeur que les loc. adv. à demi, à moitié] V.
mi-clos, mi-lourd et aussi:
mi-ajusté, -ée. Jupes plissées dépassant à peine le genou, avec les paletots mi-ajustés presque de même longueur (Mallarmé,Dern. mode, 1874, p.815).
mi-baissé, -ée. Magasins au rideau mi-baissé (Aragon,Beaux quart., 1936, p.318).
mi-circulaire. V. demi-circulaire, semi-circulaire.Sur onze escabeaux, des prélats sont assis en rang mi-circulaire (Leconte de Lisle,Poèmes barb., 1878, p.306).
mi-croisé, -ée. Les rideaux étaient mal fermés sur la fenêtre ouverte avec les persiennes mi-croisées (Aragon,Beaux quart., 1936, p.473).
mi-fermé, -ée. Derrière les persiennes mi-fermées, la maison se tait (Colette,Dialog. bêtes, 1905, p.119).
mi-foncé, -ée. Cachemire bleu clair ou mi-foncé (Mallarmé,Dern. mode, 1874, p.814).
mi-haut, -haute. Bientôt Ghéridanisol dit à Boris, à voix mi-haute (...): − Mon vieux, tu n'as plus qu'un quart d'heure (Gide,Faux-monn., 1925, p.1242).
mi-humain, -aine. Agrippine appartient à un autre monde, un monde sans Dieu, ou peuplé de dieux mi-humains, qu'on amadoue à peu de frais (Mauriac,Vie Racine, 1928, p.195).
mi-joint, -jointe. Paupières mi-jointes. Je voyais, entre les lèvres mi-jointes, briller une dent d'or (Vercors,Silence mer, 1942, p.29).
mi-long, -longue. Barbe mi-longue; cheveux mi-longs. Elle était mise à la diable: une robe à deux volants, verte à taches blanches (...) et des manches mi-longues de mousseline blanche (Aragon,Beaux quart., 1936, p.451).
mi-nu, -nue. Elle allait, les bras mi-nus, le col découvert dans la chemise de toile écrue (Pesquidoux,Livre raison, 1925, p.24).Toute la nuit, mi-nu, hagard, il se sentit brûler, consumer lentement jusqu'au plus intime de son être entre la Sainte-Face et Véronique (Jouhandeau,M. Godeau, 1926, p.83).
mi-sec, -sèche. M. Souday, quand il voyage en Amérique, met de l'eau dans son whisky. Régime mi-sec (Bremond,Poés. pure, 1926, p.42).
mi-tendre. Le kaolin et la pâte mi-tendre (Giraudoux,Suzanne, 1921, p.42).
mi-vêtu, -ue. Les jeunes filles, mi-vêtues, sont assises sous l'arbre vert (Montherl.,Olymp., 1924, p.333).
−
PHONÉTIQUE: mi-fermé, -ée. Voyelle mi-fermée. Voyelle réalisée avec la langue élevée vers le palais sans être aussi haute que pour une voyelle fermée (d'apr. Ling. 1972).
mi-occlusif, -ive. Consonne mi-occlusive et, p. ell., mi-occlusive, subst. fém. Consonne occlusive seulement au début de sa réalisation (d'apr. Ling. 1972). Synon. affriquée.
mi-ouvert, -erte. Voyelle mi-ouverte. Voyelle pour la réalisation de laquelle la langue est abaissée, sans l'être autant que pour la réalisation de [ɑ] (d'apr. Ling. 1972).
mi-sonore. Ces locutions inouïes, où l'aspiration recule au delà des voyelles et la modulation du souffle se propage, au gré de telles labiales mi-sonores, en quête de pures finales vocaliques (Saint-John Perse,Exil, 1942, p.277).Rem. Mi- fonctionne de la même façon dans mi-parti, mi-partir, mi-partition.
B. − Mi-..., mi-... (ou, plus rare, mi-... et mi-...).[Les loc. constr. sont le plus souvent adj., elles définissent un état intermédiaire entre les deux réalités exprimées ou comportant à la fois les caractéristiques de l'une et de l'autre; mi-..., mi-... y a la même valeur que les loc. moitié..., moitié... et mi-partie..., mi-partie...] 1. Mi- + adj. ou part. passé adj., mi- + adj. ou part. passé adj.Sur les terrains qui portent aujourd'hui les élégants hôtels de la plaine Monceau, les vieux Parisiens ont vu (...) tout un quartier mi-urbain, mi-rural, où les travaux des champs se mêlaient aux industries de la ville (Vogüé,Morts, 1899, p.23).Sous ces palmiers et sur cet espace amphibie, mi-aquatique, mi-terrien, aucune fleur, mais les pagnes bleus, rouges, jaunes des enfants fellahs flamboyaient (Barrès,Cahiers, t.6, 1907, p.183).SYNT. Cérémonie mi-profane, mi-religieuse; cheveux mi-gris, mi-blancs; détails mi-vrais, mi-faux; entreprise mi-agricole, mi-industrielle; étude mi-sociale, mi-littéraire; grandeur mi-bourgeoise, mi-épique; nom mi-grec, mi-latin; quartier mi-indigène, mi-européen; France mi-cléricale, mi-laïque.
−
En partic. ♦
[Le déterminé désigne une pers. ou l'une de ses attitudes] Il dit cela de sa manière mi-pincée, mi-sucrée, avec l'amertume secrète du peu que son nom, si populaire en 48, pèse sur les masses (Goncourt,Journal, 1870, p.659).−«Tu me crois capable de ça?» (...) − «Pourquoi non?» fit-il, mi-plaisant, mi-sérieux (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p.225).Incapable pourtant de retenir le trop-plein d'une force − hélas! précaire − il s'en délivra par une colère mi-réelle, mi-feinte, mêlée de larmes (Bernanos,Mauv. rêve, 1948, p.958).SYNT. (Être) mi-rieur, mi-bougon; mi-sérieux, mi-moqueur; mi-souriant, mi-agacé; mi-touché, mi-gêné; (avoir un) air mi-furieux, mi-flatté; mi-incrédule, mi-fâché; mi-sérieux, mi-ironique; (une) expression mi-amère, mi-attendrie; mi-tendre, mi-railleuse; (un) sourire mi-railleur, mi-indulgent; mi-triste, mi-amusé; (un) ton mi-gouailleur, mi-tendre; mi-plaisant, mi-attendri; mi-rageur, mi-plaintif; mi-sérieux, mi-badin; (avoir une) considération mi-intellectuelle, mi-sociale (pour qqn); (un) motif mi-artistique, mi-humanitaire (pour qqc.); (prononcer une) phrase mi-sentimentale, mi-gouailleuse.
♦ [Le déterminé désigne une réalité de l'art ou de l'archit.] Maison mi-paysanne, mi-bourgeoise; mise en scène mi-réaliste, mi-féerique. La gloire de ce musée est une abondante collection de panneaux peints, mi-gothiques, mi-flamands (Barrès,Jard. Bérén., 1891, p.31).Un décor mi-antique, mi-moderne, mêlant les colonnes d'un temple grec à une projection, sur la toile de fond, de Notre-Dame de Paris (Gide,Journal, 1932, p.1129).Nous nous arrêtons à Vicovaro pour y admirer un baptistère mi-gothique, mi-quattrocento (Green,Journal, 1935, p.24).
2. Mi- + subst., mi- + subst. (ou, plus rare, mi- + subst. et mi- + subst.).[Les loc. constr. ont une valeur adj.] V.
mi-figue, mi-raisin (
s.v. figue A).
Pastille mi-sel, mi-sucre; poème mi-complainte, mi-satire. −
En partic. ♦ [Le déterminé désigne un/des être(s) vivant(s)] Animal mi-homme, mi-cheval. Dans la salle, un public mi-ouvriers, mi-portiers retirés du cordon (Goncourt,Journal, 1866, p.240).Une petite parisienne mi-cocotte et mi-bourgeoise, née dans une arrière-boutique, élevée sur le seuil du magasin à cueillir les passants d'un coup d'œil (Maupass.,Contes et nouv., t.2, M.Parent, 1886, p.605).L'incrédule intelligent tient nécessairement le prêtre pour une énigme, pour un monstre, mi-homme, mi-ange, dont il s'étonne, dont il sourit, dont il s'inquiète assez souvent (Valéry,Variété II, 1929, p.115).C'était une grande fille rousse, mi-créature, mi-mondaine, qui faisait de la figuration dans les studios et les bars des Champs-Élysées (Sagan,Bonjour tristesse, 1954, p.14).
♦ [Le déterminé désigne un édifice ou ses alentours] L'espace ainsi clos est mi-cour, mi-jardin (Martin du G.,J. Barois, 1913, p.213).L'unique construction de planches, mi-étable et mi-grange (Hémon,M. Chapdelaine, 1916, p.193).Une existence toute faite par la terre et le temps, dans les maisons de pierre, mi-fermes, mi-châteaux (Pourrat,Gaspard, 1922, p.193).Le jardin des Delobelle, mi-potager, mi-plaisance, avait l'avantage d'un puits, et d'un très vieux figuier à l'écorce blanche, sur la basse bifurcation duquel d'habitude Pierre composait ses poèmes (Aragon,Beaux quart., 1936, p.135).
♦ [Le déterminé désigne un vêtement ou un accessoire] Des ailes de fantaisie mi-plume et mi-jais et des broderies splendides sur tulle (Mallarmé,Dern. mode, 1874, p.728).[Le cavalier] se balançait sur de très hautes jambes en pantalon charivari, mi-drap, mi-cuir (Adam,Enf. Aust., 1902, p.131).Ces tabliers de cuisine mi-laine, mi-chanvre, que rien n'usait, c'était du solide qui durerait un monde (Pourrat,Gaspard, 1925, p.61).J'ai voyagé en première, en grande tenue, manteau de fourrure, et un de ces chapeaux en hauteur, mi-turban, mi-pain de sucre, destiné à me faire passer inaperçue (Triolet,Prem. accroc, 1945, p.322).
3. Rare. Mi- + verbe et mi- + verbe.Haynes tourna quelques minutes sur la passerelle puis disparut après avoir mi-dit et mi-grogné qu'il allait surveiller le lavage des ponts (Peisson,Parti Liverpool, 1932, p.68).
4. Rare. Mi- + adv., mi- + adv.Joubert − et ceci mi-délibérément, mi-inconsciemment − reste toujours en deçà de l'absolue lucidité en matière de sentiment (Du Bos,Journal, 1924, p.157).Rem. 1. Les 2 termes de la loc. peuvent ne pas appartenir à la même partie du discours. Une course, un pèlerinage, mi-chevauchant, mi-à pied (E. de Guérin, Journal, 1838, p.239). Salons mi-gothiques, mi-Louis XV (Green, Journal, 1934, p.182). V. supra II B 1 ex. de Green. 2. Mi- peut ne pas être répété devant le 2eterme de la loc. Il est très curieux, ce petit portrait, avec la barbe mi-poivre et sel du modèle (Goncourt, Journal, 1875, p.1064). 3. Les 2 termes de la loc. peuvent être constr. l'un avec mi-, l'autre avec moitié. La jeune Corse, un peu trop petite sans doute, mais charmante, mi-paysanne et moitié dame, me traita comme un frère (Maupass., Contes et nouv., t.1, Hist. corse, 1881, p.47). 4. Lorsque mi-..., mi-... est constr. avec des loc. adv. précédées de à, l'élém. se comporte dans chacun des termes de la loc. comme un adv. indépendant; il n'est plus séparé par un tiret du 2eélém. Le vieux Bob savait imparfaitement le français et le prononçait mi à l'anglaise, mi à l'espagnole (G. Leroux, Parfum, 1908, 64).
Rem. gén. Dans certaines constr., mi- entre en concurrence avec demi- et beaucoup plus rarement avec semi-. L'élém. hémi-, dont le sens est identique, a une portée beaucoup moins gén.; il semble réservé à la constr. de termes savants.