JETÉ, subst. masc.
I. A. − Littér. Action de jeter, de lancer (quelque chose); résultat de cette action. Sous les yeux de l'Alpiniste, au jeté de son pic, des crevasses se fendaient (A. Daudet, Tartarin Alpes,1885, p. 182).
B. − Spécialement 1. Disposition des plis (d'une draperie, d'un vêtement) selon un négligé élégant. L'Aumône admirait sincèrement la prestance de son interlocuteur, le jeté de la cape, le crayeux de la guêtre, le nœud de la lavallière (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 29).−
P. méton. Pièce d'étoffe brodée ou travaillée au crochet, à effet décoratif, que l'on dispose sur un meuble, un lit. Les dentelles de la vieille dame, en nappes, en tapis, en jetés de fauteuil, répandaient une blancheur passée de mode (A. Daudet, Évangéliste,1883, p. 40).Jeté de lit : 1. ... après la distribution des prix, la ville entière vient admirer nos travaux exposés,emplissant deux classes (...). Les murs sont tendus de rideaux ajourés, de jetés de lit au crochet sur transparents de couleur...
Colette, Cl. école,1900, p. 247.
2. MUS. ,,Coup d'archet (...) qui utilise le rebondissement de l'archet sur la corde`` (Pinch. Mus. 1973). Une variété du coup d'archet sautillé est le jeté. On l'obtient en lançant l'archet (...) et le faisant rebondir sur la corde, de manière à produire une émission rapide de deux, trois ou quatre sons égaux en durée (Gevaert, Instrument.,1885, p. 28).
3. TRICOT. Laine placée sur l'aiguille avant qu'elle n'ait traversé une maille pour devenir elle-même une boucle ou maille. Tricoter les mailles comme elles se présentent et les jetés à l'envers (Cahier explicatif Phildar Maillesds Phildar Mailles,1979, no73, p. 4, col. 1).
II. − Action de pousser, de diriger avec force ses bras ou ses jambes, dans une direction donnée; résultat de cette action. A. − CHORÉGR. ,,Saut exécuté d'une jambe sur l'autre sans déplacer le corps`` (Giteau 1970). Jeté simple; grand jeté. Il [un danseur] (...) traverse la scène par d'amples et pathétiques jetés (Levinson, Danse,1924, p. 22).La variation du danseur, faite pour la vigueur masculine, comprend de grands jetés avec battements, de hauts entrechats droits (Arts et litt., 1935, p. 46-4).♦ Jeté battu. ,,Jeté au cours duquel s'ajoute un croisement`` (Giteau 1970). Le jeté battu a les mêmes départ et arrivée que le jeté simple, mais sa présentation s'orne en supplément d'un croisement des jambes exécuté pendant la projection (Bourgat, Techn. danse,1959, p. 105).
B. − HALTÉROPHILIE. Mouvement consistant à amener la barre au bout des bras tendus verticalement, par une flexion et une détente brusque des jambes. Sa meilleure performance fut réalisée au jeté à deux bras avec un jet de 110 kilos (Match,mars 1935, p. 4 ds Grubb, Fr. sp. neol., 1937, p. 26):2. Deuxième temps : jeté. La barre doit être élevée jusqu'à complète extension des bras, l'athlète fléchissant sur ses jambes et les détendant en même temps que les bras.
Jeux et sports,1967, p. 1289.
Rem. Ce mouvement est le second temps de l'épaulé et jeté ou épaulé-jeté (v. épaulé). Maintenant (...) s'amorce une compétition réservée aux espoirs poids moyens (...) en trois mouvements classiques : développé, arraché, épaulé-jeté (Arnoux, Paris, 1939, p. 204). En épaulé et jeté, voici les meilleures performances enregistrées : Poids coq : 1. Chariot, 87 kg 5 (L'Œuvre, 17 févr. 1941).
Prononc. et Orth. : [ʒ(ə)te]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. [1704, Trév. d'apr. FEW t. 5, p. 13b] 1725 danse (P. Rameau, Le Maître à danser, chap. XXIII, p. 93 : faites un jetté échapé du pied gauche); 2. 1856 « disposition, mise harmonieuse (des plis) » (Barb. d'Aurev., Memor. 3, p. 77 : un jeté si fier et d'une rencontre de plis si heureuse); 3. 1867 tricot (Littré); 4. a) 1883 « bande de tissu travaillé posé sur un meuble comme ornement » (A. Daudet, Evangéliste, p. 40); b) 1889 jetée de lit (Havard); 1900 jetés de lit (Colette, loc. cit.); 5. 1885 mus. « coup d'archet d'un certain effet » (Gevaert, loc. cit.); 6. a) 1885 « action de lancer, mouvement de projection » (A. Daudet, loc. cit.); b) 1927 spéc. haltérophilie (Miroir des Sports, XVII, 414 b et 451 a d'apr. R. Arveiller ds R. Ling. rom., t. 39, p. 207). Part. passé substantivé de jeter*. Fréq. abs. littér. : 4 699. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 6 732, b) 7 819; xxes. : a) 7 625, b) 5 462.