1. [En parlant d'une pers., d'un ensemble de pers.] Être conservateur en politique (cf. infra) : 7. La fortune, selon qu'elle est meilleure ou pire,
Jusque sur la pensée exerce son empire :
Tels sont amis de l'ordre, et se croient convaincus,
Qui sont conservateurs pour garder leurs écus;
Tels autres au progrès ont consacré leur vie,
Que l'orgueil fit tribuns, et novateurs l'envie;
Donne tout à ceux-ci, rien à ceux-là; ...
Ponsard, L'Honneur et l'argent,1853, I, 3, p. 15.
− Spéc., HIST. Parti conservateur. Je veux bien me dégager d'un pessimisme politique qui est souvent le caractère du parti conservateur pour examiner le phénomène moral qu'est ce désir de détruire (Barrès, Mes cahiers,t. 9, 1911-12, p. 21).République conservatrice (p. réf. au gouvernement d'union nationale de févr. 1871). Thiers disait que la république « serait conservatrice ou ne serait pas » et il demandait qu'on en fît « l'essai loyal » (Bainville, Histoire de France,t. 2, 1924, p. 227).Sénat conservateur (p. réf. au sénat sous le premier et second empire). Art. 15. Le sénat conservateur est composé de 80 membres, inamovibles et à vie, âgés de 40 ans au moins (Titre II de la constitution de l'an VIII, Les Constitutions de la France depuis 1789, Paris, Garnier, Flammarion, 1970, p. 153).Toute l'importance politique devait se concentrer dans le sénat conservateur, qui réunissait tous les pouvoirs, hors un seul (MmeDe Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 2, 1817, p. 20).
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En partic. [À propos de l'idéologie d'un parti conservateur étranger; spéc. du parti conservateur anglais] Hogg, en effet, devenait de plus en plus britannique et conservateur; il faisait maintenant l'éloge de la tradition, des sports, des public-schools et indiquait les bonnes années de porto (Maurois, Ariel ou la Vie de Shelley,1923, p. 186).♦
Emploi subst. Journal d'un parti conservateur; membre d'un parti conservateur : 8. Je parlai à mes amis MM. de Bonald et de Lamennais, je leur demandai s'ils voulaient s'associer à moi; ils y consentirent, et le journal ne tarda pas à paraître sous le nom de Conservateur. La révolution opérée par ce journal fut inouïe : en France il changea la majorité dans les Chambres; à l'étranger il transforma l'esprit des cabinets. Son influence fut telle que son nom a survécu à son existence : les Tories ont pris le nom de Conservateurs, ...
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 3, 1848, p. 29.
Rem. On rencontre aussi le synon. conservatiste. Le parti conservatiste, au contraire, l'a voulue comme instrument de contre-révolution. Aujourd'hui les situations sont retournées, mais les rôles restent les mêmes. Les conservatistes trament sournoisement le crime de la paix, pour renverser la République, dût la France en périr (A. Blanqui, La Patrie en danger, 22 sept. 1870 cité par Galtier-Boissière ds Le Crapouillot, avr. 1959, no44, pp. 35-36). Attesté également ds Littré, Guérin 1892, Nouv. Lar. ill., Lar. 20e, Rob. Suppl.
2. P. ext. [En parlant d'une entité abstr. ou d'une œuvre humaine] On m'a dit que les insurgés arrêtaient les personnes connues pour leurs opinions conservatrices (Zola, La Fortune des Rougon,1871, p. 109):9. La France se partagea en dreyfusards et en antidreyfusards. Cette lutte de doctrines, de sentiments, de tendances, où se heurtaient l'esprit conservateur et l'esprit révolutionnaire, répétait, sous une forme réduite et atténuée, les grandes crises du quatorzième siècle, ...
Bainville, Histoire de France,t. 2, 1924, p. 245.
Rem. Certains auteurs jouent sur les emplois A et B. Il est remarquable, cher ami, que le conseil municipal de Paris, qui n'est pas conservateur en politique, le soit du moins des vieilles pierres et des vieux souvenirs (A. France, La Vie littér., t. 3, 1891, p. 351).