− Domaine
milit.Engagé volontaire faisant la guerre pour s'illustrer par les armes, sans recevoir de solde; p. ext. soldat mercenaire : 10. Ce sont les soldats accoutumés au brigandage, c'est la lie du peuple, ce sont des aventuriers pervers et immoraux, tels que Regnault de Saint-Jean-d'Angély, Fouché, etc., qui ont appelé Bonaparte. Il a enfreint un traité qu'il avait consenti lui-même; il vient comme un pirate, comme un brigand, avec le poignard d'un Genséric et la massue d'un jacobin, porter encore la désolation chez ce peuple qui l'avait repoussé.
Maine de Biran, Journal,1815, p. 50.
11. Le conseil de Bourgogne s'occupa aussitôt de pourvoir à la sûreté du duché. On convoqua des hommes d'armes; Antoine de Toulongeon fut chargé de l'office de maréchal, au lieu de son frère prisonnier; un nommé Perrin Grasset, aventurier et chef de compagnie, fut envoyé dans le Charolais, et tarda peu à surprendre la ville de la Charité, si importante pour les Français à qui elle assurait le passage de la Loire.
Barante, Hist. des ducs de Bourgogne,t. 4, 1824, p. 418.
12. Il se laissa entraîner à conter ses campagnes africaines. Gigantesques aventures, dignes de celles des Pizarre et des Cortès! Christophe voyait revivre avec stupéfaction cette épopée merveilleuse et barbare, dont il ne savait rien, que les Français eux-mêmes ignorent presque tous, et où, pendant vingt ans, se dépensèrent l'héroïsme, l'audace ingénieuse, l'énergie surhumaine d'une poignée de conquérants français, (...) conquérant à la France, en dépit de la France, un empire plus grand qu'elle. Une odeur de joie puissante et de sang montait de cette action, où surgissaient aux yeux de Christophe, des figures de modernes condottieri, d'aventuriers héroïques, imprévues dans la France d'aujourd'hui, et que la France d'aujourd'hui rougit de reconnaître : pudiquement, elle jette sur eux un voile.
R. Rolland, Jean-Christophe,Dans la maison, 1909, p. 1038.
13. Je regarde leurs faces crispées, pâlies, profondes. Ce ne sont pas des soldats : ce sont des hommes. Ce ne sont pas des aventuriers, des guerriers, faits pour la boucherie humaine − bouchers ou bétail. Ce sont des laboureurs et des ouvriers qu'on reconnaît dans leurs uniformes. Ce sont des civils déracinés.
Barbusse, Le Feu,1916, p. 265.
14. Égaré dans notre temps, fait pour la conquête et le rapt, on le voyait entrant dans une ville forcée, l'armure mi-rompue, au glas du tocsin, le regard en quête de proies vives et de butin gisant... S'il avait les instincts, il avait aussi les dons des grands aventuriers d'autrefois. Les intellectuels : instruit, artiste, éloquent; surtout les militaires. Partout dans le champ du métier il primait : au quartier, à la manœuvre, à la critique des opérations. Il était fertile, sagace, inventif; il procédait par saillies et intuitions, si perçantes qu'elles semblaient des divinations. Il possédait à l'aigu le sens du terrain, ce coup d'œil jeté dans l'espace, qui est le propre du cavalier.
Pesquidoux, Le Livre de raison,1925, p. 218.
SYNT. Hardi, vieil aventurier; bande d'aventuriers. − PARAD. (Quasi-)synon. soudard, spadassin.
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Spéc., HIST. Celui qui recherche les aventures de chevalerie : 15. ... au point de vue politique il avait été vraiment l'homme nécessaire, taillé à la mesure de l'épopée ou plutôt la dominant, puisque, seul d'entre tous ces paladins, il sut intégralement, cette épopée, la « réaliser » à son profit. En lui en effet l'aventurier sans scrupules avait tout naturellement, tout continûment fait place à l'homme d'état, (...). Les anciens Grecs, à la manière des bâtisseurs d'empire, l'eussent nommé Baudouin le Fondateur. Cet état franc de Jérusalem, né de la surprise, se trouvera, dès que posé par lui, du jour au lendemain si solide que nul après lui n'osera le remettre en question. C'est en cela que le formidable aventurier dépasse l'aventure. De cette marche extrême de la chrétienté il fit ce qu'elle devait être pour rester viable : une solide monarchie militaire.
Grousset, L'Épopée des croisades,1939, p. 107.
− Domaine de la
mar.Celui qui court l'aventure par mer; p. ext. (quasi-) synon. de boucanier, écumeur de mer, flibustier, pirate :16. Oh! mener une vie de Mohican, courir sur les rochers, nager en mer, respirer en plein l'air, le soleil! oh! que j'ai conçu le sauvage! oh! que j'ai admirablement compris les corsaires, les aventuriers, les vies d'opposition; et, là, je me disais : « La vie, c'est du courage, de bonnes carabines, l'art de se diriger en pleine mer et la haine de l'homme (de l'Anglais, par exemple). »
Balzac, Correspondance,1832-35, p. 461.
17. L'horrible Andronic Premier, bourreau de l'Empire, inopinément jeté à bas de son trône, est abandonné à la racaille de Constantinople. Et quelle racaille! Toutes les écumes de la Méditerranée : bandits venus de Carthage, de Syracuse, de Thessalonique, d'Alexandrie, d'Ascalon, de Césarée, d'Antioche; matelots génois ou pisans; aventuriers cypriotes, crétois, arméniens, ciliciens et turcomans; sans parler de ce grouillement barbare, de cette vase dangereuse du Danube qui empuantit la Grèce depuis le Bulgaroctone.
Bloy, La Femme pauvre,1897, p. 146.
18. Qu'est-ce que nous allions faire sur la mer? Qu'est-ce que nous sommes allés trafiquer sur ces terres aux noms épouvantables que les anciens n'ont pas connus et où nos hidalgos n'ont fait que gagner les sobriquets de racleurs de cuirs et de mâcheurs de cachous? Est-ce un bon et authentique Castillan qui nous a ainsi pris par la main pour nous mener au delà de la mer vers notre Couchant? C'est un Génois, un métèque, un aventurier, un fou, un romantique, un illuminé plein de prophètes, un menteur, un intrigant, un spéculateur, un ignorant qui ne savait pas regarder une carte, bâtard d'un Turc et d'une Juive! Et cet autre, qui non content de découvrir une autre terre s'est mis en tête de nous apporter un autre Océan, comme si un seul déjà ne suffisait pas à nos pauvres mariniers, ...
Claudel, Le Soulier de satin,1929, journée 3, 2, p. 779.
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Spéc., MAR., p. méton., vieilli. Navire marchand, sans escorte militaire, armé pour se défendre seul en cas de guerre : 19. C'était un aventurier marchand, gris de quille, avec des flancs étroits et bosselés, où s'attachait encore la souillure de la vase, et un grand mât qui rappelait les brumes de l'estuaire. Il avait accompli déjà un grand voyage entre des horizons si éloignés qu'ils reculaient dans la brume et, poursuivant son chemin dans la ville, son chemin étroit, absurde pour sa force de navire, il n'aspirait plus qu'à atteindre, de contrariété en contrariété, de barrière en barrière, le flot libre du Saint-Laurent et, plus tard, le roulis des grands lacs.
G. Roy, Bonheur d'occasion,1945, p. 305.
Rem. Attesté ds Besch. 1845, Lar. 19e-Lar. encyclop., Littré, Guérin 1892, Quillet.