a) [L'accent est mis sur la hiérarchie au sein d'une échelle de valeurs] Niveau, position à l'intérieur d'un ensemble hiérarchisé. Synon. classe, échelon, grade, rang.Tous les degrés de l'échelle vivante (Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 970):6. C'est que cette complication apparente n'est, en effet, qu'une juxta-position de simplicités réelles, dont chacune offre à l'esprit un degré, un échelon, une branche, à l'aide desquels il arrive au sommet, en sautant et en se jouant.
Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 459.
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En partic. [À l'intérieur d'un corps soc.] ♦ ARMÉE, vieilli. Grade militaire. Cette échelle de grades dont chaque degré nous coûtait huit ans à gravir (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p. 128).
♦ ÉGLISE. Rang dans l'Église. Synon. ordre.Il [Lancelot] ne fut jamais prêtre (...) : il s'arrêta au degré de sous-diacre (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 1, 1840, p. 443).
♦ ENSEIGN., vieilli. Titre, diplôme universitaire. L'on me demande (...) où sont mes titres, (...) j'ai pris mes degrés à l'école de Plutarque (Jouy, Hermite,t. 2, 1812, p. 369).Le degré honoraire de docteur-ès-lettres (Barrès, Cahiers,t. 11, 1917-18, p. 375).
♦ JURISPR. Degré de juridiction. Place d'un tribunal dans l'ordre hiérarchique des juridictions devant lesquelles on peut appeler une même affaire. Le principe du double degré de juridiction offre la garantie de pouvoir obtenir un second examen des affaires (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr.,1967, p. 47).
b) [L'accent est mis sur la progression vers un terme] Étape d'une évolution; intensité relative d'un état (sentiment, qualité, faculté, etc.). Synon. point, stade.Il suffit d'un très petit degré d'espérance pour causer la naissance de l'amour (Stendhal, Amour,1822, p. 12).Le plus haut degré de civilisation s'exprime par le fait que charité est devenu synonyme d'humanité (Mauriac, Bâillon dén.,1945, p. 475):7. le démon. − L'esprit du mal
Est né dans tout homme qui est né.
Et d'abord, cédant à la douceur nouvelle
De faire mal, il succombe : tel est le premier degré.
L'habitude se forme, et par le second degré, établi dans sa connaissance et dans sa volonté,
Il pèche, sachant ce qu'il fait, et ce degré est appelé l'Inclination.
Et voici le troisième degré : et celui qui l'a atteint
Est mûr entre les hommes, et n'ayant plus rien à apprendre de moi déjà,
Il est digne d'une demeure plus basse :
Le mal
Ni ne lui cause plus de plaisir, ni ne lui rapporte profit.
Claudel, Le Repos du septième jour,1901, II, p. 823.
8. ... ce n'est pas en élargissant la cité qu'on arrive à l'humanité : entre une morale sociale et une morale humaine la différence n'est pas de degré, mais de nature.
Bergson, Les Deux sources de la mor. et de la relig.,1932, p. 31.
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PATHOL. Stade de l'évolution d'une maladie ou d'une lésion. Le dernier degré de la maladie produit une sorte de fureur (Cabanis, Rapp. phys. mor.,t. 1, 1808, p. 467).La carie du deuxième degré atteint la dentine (Quillet Méd.1965, p. 177).♦ En partic. [Dans le cas d'une brûlure] La cuisse brûlée au troisième degré (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 91).
c) P. méton. État intermédiaire. Synon. gradation, nuance.D'étranges degrés, des variétés et des phases ineffables (Valéry, Variété I,1924, p. 205):9. Et Liebknecht dit avec raison qu'il y aura des degrés, des nuances, des modalités sans nombre dans cette participation du socialisme au pouvoir.
Jaurès, Ét. socialistes,1901, p. 58.
10. ... l'on conçoit des degrés infinis dans toute la nature, et des degrés infinis en nous, conscience, subconscience, inconscience; et ces derniers degrés, les plus obscurs, conduisent même à dire qu'on peut avoir des pensées sans savoir qu'on les a, ...
Alain, Propos,1928, p. 812.
SYNT. Degré d'abstraction, d'attention, de certitude, de complication, de confiance, de connaissance, de conscience, de culture, de développement, d'énergie, d'évidence, d'évolution, d'exaltation, de force, de généralité, d'importance, d'incertitude, d'intensité, d'intimité, de liberté, de misère, de puissance, de perfection, de perfectionnement, de précision; degré avancé, élevé, éminent, moindre; faible, haut degré; différence de degrés; degrés intermédiaires, insensibles, successifs, variables.
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Loc. fig. ♦ À aucun degré. D'aucune sorte, nullement. Odette n'était à aucun degré une femme remarquable (Proust, Swann,1913, p. 271).Au dernier degré. Au maximum, au plus fort. L'irritation de tous les Anglais contre Napoléon était au dernier degré (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 887).Au même degré. De la même manière, pareillement. La responsabilité des trois accusés a été engagée au même degré (Gide, Souv. Cour d'ass.,1913, p. 660).Au plus haut, au suprême degré. Au plus haut point, extrêmement. MmePaulin m'avait agacé au suprême degré (Frapié, Maternelle,1904, p. 170).
♦ De degré(s) en degré(s). Progressivement, graduellement. De degré en degré, des collines partant de la plaine s'élevaient (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 288).
♦ Par degré(s). D'une façon progressive, graduellement. Ce ciel qui par degré se peint d'un gris obscur (Michaud, Printemps proscrit,1803, p. 105).Ce lien, se contractant progressivement, bandait par degrés leurs muscles pour la lutte (Pergaud, De Goupil,1910, p. 113).Apparaître peu à peu, par degrés (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1135).
♦ Au second, au troisième degré; du second, du troisième degré (pour traduire l'intensité ou l'éloignement). Narcisse (...) est malade d'exagération au troisième degré (Musset, Lettres Dupuis Cotonet,1837, p. 525).Un naturel plus profond, un naturel au deuxième degré que m'offrait son sommeil (Proust, Prisonn.,1922, p. 71).Des témoignages du second, du troisième degré, des dires de dires (Arnoux, Roi d'un jour,1956, p. 122).Un souvenir au second, au troisième degré (Durry, Nerval,1956, p. 13).