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[La partie du corps ne fait l'obj. d'aucune valorisation partic.] ♦
[Expr. et loc. fig. avec art.] Avoir un mot, un nom sur le bout de la langue, sur le bout de la plume. Être sur le point de s'en souvenir, de l'avoir naturellement à l'esprit, ou de l'écrire. Avoir une question sur le bout de la langue (Farrère, L'Homme qui assassina,1907, p. 177);avoir une sottise au bout de la plume (Musset, Namouna,1832, p. 412):18. − Ça? Attendez donc! me répond-il. Je ne me rappelle pas son nom. Il y en avait deux, vous savez bien, qui couraient dans l'herbe, la semaine dernière, l'un après l'autre. Diable de nom! Je l'ai sur le bout de la langue.
Il cherche. Nous cherchons ensemble.
− Ah! dit-il soudain, j'y suis! Je me rappelle. Eh! bien, monsieur, c'est un petit chien.
Renard, Journal,1896, p. 320.
♦ [Expr. et loc. fig. sans art.] À bout de bras, tenir qqc. à bout de bras. À l'extrémité de la main et en ayant du mal à porter l'objet. Boucliers portés à bout de bras (Gide, Le Retour du Tchad,1928, p. 967).Au fig. Soutenir qqn ou qqc. à bout de bras. Faire tout son possible pour qu'une situation demeure la même, faire le maximum pour aider une personne se trouvant dans la misère physique ou morale (cf. Montherlant, Les Lépreuses, 1939, p. 1468).
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[La partie du corps est valorisée] ♦ Montrer le bout du nez. Se faire voir, se faire remarquer dans une conversation; dévoiler ses intentions (cf. L. Schneider, Les Maîtres de l'opérette fr., Charles Lecocq, 1924, p. 233).
♦ Toucher la vérité du bout des doigts. Approcher de la solution.
♦ Avoir une qualité (ou un défaut) au bout des doigts ou jusqu'au bout des ongles. En avoir beaucoup (cf. Balzac, Eugénie Grandet, 1834, p. 141).Var. Avoir de l'honneur jusqu'au bout des cheveux (Balzac, Eugénie Grandet, 1834, p. 141).
♦ Connaître, posséder son métier jusqu'au bout des ongles. Le savoir à fond (cf. Sainte-Beuve, Pensées et maximes, 1868, p. 102).
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Savoir qqc. sur le bout des doigts. Par cœur : 19. Il paraît certain qu'il est né en Italie, dans la Capitanate, et qu'il a été élevé en Espagne. Il se prétend allié à une grande famille espagnole. Lord Clinton sait cela sur le bout du doigt.
Hugo, Marie Tudor,1833, journée I, 1, p. 7.
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Connaître qqc. ou qqn sur le bout du doigt : 20. Oh! je les connais sur le bout du doigt, les Rougon; je les ai suivis. Ce sont des gens très forts! Ils avaient une rage d'appétits à jouer du couteau au coin d'un bois. Le coup d'État les a aidés à satisfaire un rêve de jouissances qui les torturait depuis quarante ans.
Zola, La Conquête de Plassans,1874, p. 951.
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[Avec dépréciation de la partie du corps] ♦
Ne pas voir plus loin que le bout de son nez. Avoir peu de prévoyance : 21. − C'est tout ce que vous leur reprochez? une erreur de calcul? demanda Scriassine avec sévérité.
− Je leur reproche de ne pas y voir plus loin que le bout de leur nez.
Dubreuilh haussa les épaules : « La reconstruction, c'est très joli : mais pas par n'importe quel moyen. »
S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 110.
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Mener qqn par le bout du nez. Lui faire exécuter tous ses caprices : 22. Vous viendrez vous installer ici. Et dès aujourd'hui. Ou vous aurez affaire à Cosette. Elle entend nous mener tous par le bout du nez, je vous en préviens.
Hugo, Les Misérables,t. 2, 1862, p. 658.
♦ Cela lui pend au bout du nez, voilà ce qui lui pend au bout du nez (Flaubert, Correspondance,1863, p. 320).
♦ Manger du bout des dents, du bout des lèvres. [Manger] sans appétit et avec une sorte de dégoût (cf. T. Gautier, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 239).
♦ Sourire du bout des dents, sourire du bout des lèvres (A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 341).
♦ Remercier du bout des lèvres. Remercier sans trop ouvrir la bouche, et plus figurément, sans franchise (cf. Stendhal, La Chartreuse de Parme, 1839, p. 302).
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Ne pas remuer le bout du petit doigt. Ne pas bouger, ne rien faire pour quelqu'un : 23. Dire que si, en votre qualité d'ange, vous vouliez seulement, remuer le bout de votre petit doigt, vous forceriez, tout bonnement, − en dépit de la niaiserie et de l'injustice des objections possibles, − ...
Villiers de L'Isle-Adam, Correspondance,1884, p. 56.
♦ Montrer le bout de l'oreille. Faire une courte apparition, donner son avis dans une discussion, et p. ext. se trahir (cf. Bremond, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 4, 1920, p. 477).
♦ Se faire tirer le bout de l'oreille. Se faire prier longuement avant de se décider.
♦ Repousser qqn ou qqc. du bout du pied (Billy, Introïbo, 1939, p. 54).
♦ Le bout de nous-mêmes (rare). Le plus profond de nous, notre propre limite (cf. Teilhard de Chardin, Le Phénomène humain, 1955, p. 292).