1. [Le suj. et l'obj. désignent un animé ou un inanimé] Apporter son secours ou sa protection contre une agression physique ou morale, existante ou éventuelle, en recourant à la force le cas échéant. (Quasi-)synon. protéger, secourir, soutenir; anton. attaquer.La poule qui défend ses poussins (Chateaubr., Génie,t. 1, 1803, p. 168):1. ... ce père est assis sur le rocher, et des pensées de mort l'occupent; il veut la vie de son ennemi; mais il la veut pour vous, mes enfants, pour vous protéger, pour vous défendre; c'est pour sauver vos jours et votre douce innocence qu'il tend son arc vengeur.
Mmede Staël, De l'Allemagne,t. 3, 1810, p. 17.
2. Et j'admire ce maure qui ne défend pas sa liberté, car dans le désert on est toujours libre, qui ne défend pas de trésors visibles, car le désert est nu, mais qui défend un royaume secret.
Saint-Exupéry, Terre des hommes,1939, p. 198.
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P. ext. Défendre sa (propre) vie, (pop.) défendre sa peau. Lutter pour son existence. Leur général obligé de défendre sa vie contre les accusations d'un rhéteur (Chateaubr., Martyrs,t. 3, 1810, p. 22).Dans l'intention de défendre cruellement ma peau (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 636).♦ Pop. Défendre son bifteck. Lutter pour son existence ou pour ses moyens d'existence. Quand le parasite est en danger, le parasité le défend, il défend son bifteck (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 17).
♦ En partic., dans le cas d'une entreprise galante. Défendre son honneur, sa pudeur, sa vertu. Il défendait sa boutique comme une fille honnête défend sa vertu (Zola, Bonh. dames,1883, p. 581).
− Emploi abs., rare. La raison neutre assiste au drame, Mais le cœur crie au bras : défends! (Sully Prudh., Vaines tendr.,1875, p. 215).
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Loc. À son corps défendant ♦ Vx. En combattant pour sauver sa vie. Quand César passa le Rubicon (...) César avait une armée et marchait à son corps défendant (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 141).L'homme qui en a tué un autre, fût-ce même à son corps défendant (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 182).
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Au fig. (On rencontre aussi dans cet emploi − notamment chez Gide −
À (son) cœur défendant. « À contre-cœur, malgré soi »).
Je ne me suis présenté à la politique qu'à mon cœur défendant (Lamartine, Corresp.,1831, p. 171).Sans le vouloir, sans le savoir, et souvent à cœur défendant (Gide, Feuillets d'automne,1949, p. 310).Proverbe, vx. Bien attaqué, bien défendu. V.
attaquer I B 3 b.
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SP. Défendre les couleurs, un titre. Lutter en compétition pour faire triompher le titre, etc., d'une équipe à laquelle on appartient. Il était bien décidé à le défendre son titre et au second round (...) il étendit raide évanoui son adversaire (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 174).Rem. On rencontre ds la docum. défendant, ante employé comme adj. Un joueur de l'équipe défendante (J. Mercier, Football, 1966, p. 25).
2. [L'obj. désigne une pers. ou un inanimé abstr. concernant une pers.] Soutenir oralement quelqu'un ou quelque chose contre des accusations. M. de Lally (...) qui défend la mémoire de son père avec tant de chaleur (Staël, Lettres jeun.,1786, p. 113).−
DR. Plaider pour quelqu'un. Bigourd le défendra, et Bigourd est un habile avocat (A. France, Île ping.,1908, p. 241):3. Ah! vraiment, dit l'avocat feignant de croire qu'on lui proposait une cause à défendre; je serai heureux, Monsieur, de défendre vos intérêts, j'y mettrai l'ardeur que vous m'avez vu déployer dans ma dernière plaidoirie.
Champfleury, Les Bourgeois de Molinchart,1855, p. 234.
♦ Emploi abs. ,,Fournir des défenses aux demandes de la partie adverse``. Il a été condamné faute de défendre (Ac.1798-1932).Il [le mineur émancipé] ne pourra intenter une action immobilière, ni y défendre (Code civil,1804, art. 482, p. 89).
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Loc. Défendre son pain (vx). ,,Soutenir un procès dans lequel tous les moyens d'existence sont engagés`` (Littré) ; attesté ds
Ac. 1798-1878 et
Besch. 1845.
Rem. On rencontre ds la docum. défendant employé comme subst. masc. Synon. défendeur. À l'audience, le plaignant, le défendant et chaque témoin sont soumis (...) à un interrogatoire (Taine, Notes Anglet., 1872, p. 282).
3. Emploi fig. [L'obj. désigne un inanimé abstr. : une cause, un parti, une thèse, etc.] Soutenir par la parole ou par l'écrit. Synon. prendre parti pour; synon. littér. prôner.Le traité où Mariana va jusqu'à défendre le régicide (Chateaubr., Génie,t. 2, 1803, p. 89).Le préfet défend l'instruction secondaire, mais abandonne l'instruction primaire (Michelet, Journal,1843, p. 518).J'ai toujours honoré ceux qui défendent la grammaire ou la logique (Proust, Temps retr.,1922, p. 797).SYNT. Défendre l'empire, la patrie, le pays, la république, le royaume, la société, le trône et l'autel, la ville; défendre son bonheur, son indépendance, ses intérêts, ses positions; défendre les droits, la foi, les idées, la justice, la liberté, des prérogatives, des principes, la propriété, la vérité; défendre âprement, avec courage, avec chaleur, chaleureusement, désespérément; défendre et attaquer, et protéger, et soutenir, et venger; défendre contre les ennemis; courage, droit, mission, moyen, nécessité de défendre; chargé de, prêt à, résolu à défendre; facile, impossible à défendre; jurer de, être obligé de, oser, pouvoir, savoir, prétendre défendre; il s'agit de défendre.