SPIRITUEUX, -EUSE, adj. et subst. masc.
I. − Adjectif A. − [En parlant d'un liquide] 1. Vx. Qui contient un principe chimique subtil, volatil. Qui de nous regarde assez superficiellement ces choses, pour ne pas comprendre d'où elles germent profondément sous la terre? matériaux noirs et crus d'une écume spiritueuse et ignée (Chateaubr., Paradis perdu, 1836, p. 43).
2. En partic. Qui contient de l'esprit-de-vin ou de l'alcool, généralement en grande quantité. Synon. alcoolisé.Liquide, vin spiritueux. Les ophtalmies et la gale affectent le plus grand nombre de ces Américains [de la Californie] : ils ne font cependant aucun usage de boissons spiritueuses (Voy. La Pérouse, t. 4, 1797, p. 50).Si vous buvez un verre de liqueur spiritueuse, la chaleur que vous sentez se développer dans votre estomac ne provient pas assurément de votre respiration augmentée (Lamarck, Philos. zool., t. 2, 1809, p. 33).♦ Vieilli. Eaux spiritueuses. Synon. de esprits (v. esprit 1reSection II A 2).Les nations des grands lacs et de l'Ohio (...) exposées, comme les autres, aux ravages de la petite vérole et à l'abus des eaux spiritueuses, marchent aussi vers l'anéantissement avec une étonnante rapidité (Crèvecœur, Voyage, t. 1, 1801, p. 3).P. métaph. Virgile, Horace, Racine: sont des eaux spiritueuses qui réveillent ma pensée quand elle est épuisée par le travail, je les respire et voilà mes forces rétablies (Chênedollé,Journal,1818,p. 97).
B. − Au fig., rare. [En parlant d'une pers.] Qui est agité, en effervescence. Synon. ardent, bouillonnant, exalté, excité.Rassemblez des hommes rendus spiritueux par une passion quelconque, vous ne tarderez pas à voir la chaleur, puis l'exaltation, et bientôt le délire (J. de Maistre, Pape, 1819, p. 79).
II. − Subst. masc. A. − Rare. Partie subtile, volatile d'un liquide alcoolisé. La négligence dans le remplissage des tonneaux, permettant au vin le contact avec l'air atmosphérique, cause toujours la perte du bouquet et l'évaporation du spiritueux (Audot, Cuisin. campagne et ville, 1896, p. 543).
B. − Surtout dans la lang. admin. et comm. Les spiritueux. Les boissons spiritueuses. Maison de spiritueux; commerce de vins et spiritueux; taxe sur les spiritueux; abuser des spiritueux; proscrire les spiritueux. « Donnez-lui une goutte de sacré-chien, (...); je garantis que, s'il n'est pas encore bien loin dans l'autre monde, il reviendra pour y goûter. » Effectivement à la première cuillerée de spiritueux le mort ouvrit les yeux (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 135).Il est impossible de combattre l'abus de l'alcool si on en permet l'usage modéré. Nous projetons de faire une campagne pour une loi qui interdise absolument la vente des spiritueux, exception faite en faveur des usages pharmaceutiques (Bourget, Actes suivent, 1926, p. 134).
REM. Spirituosité, subst. fém.,,État d'un liquide spiritueux, degré d'alcoolisation`` (Chesn. t. 2 1858). La spirituosité du vin. Des vins privés de spirituosité avaient cependant la propriété de se convertir par la distillation en eaux-de-vie les meilleures du monde (Odart, Ampélographie Universelle, 1854, p. 99).
Prononc. et Orth.: [spiʀitɥø], fém. [-ø:z]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1515 méd. anc. « contenant des esprits animaux » (Jean Falcon, Notables declaratifz sur le Guidon, fo8 ds Sigurs, p. 373); 2. a) 1672 liqueur spiritueuse (Bauderon, La Pharmacopée, p. 113); b) 1827 subst. (MmeCelnart, Man. des dames ou L'Art de la toilette, pp. 37-38 ds Quem. DDL t. 16). Dér. du lat. spiritus « esprit » (v. ce mot); suff. -eux*; cf. lat. sc. spirituosus « contenant des esprits animaux » (1620 ds Latham). Fréq. abs. littér.: 63. Bbg. Gorcy (G.). Cf. bbg. spiritualité.